On y était... Nils Frahm au Trianon

/ mardi 2 juin 2015 /

Nils Frahm fait partie de ces artistes qui, à l'instar d'un Nick Cave, tracent leurs route dans leurs coin fidèles à leurs musique et ne se laissent pas influencer par les tendances. Depuis quelques années déjà, l'allemand originaire de Hambourg partage une certaine vision de la musique et démontre ses talents de pianiste à travers le monde. 

De formation classique, le garçon est tout de même un des derniers élèves de Nahum Brodski, réputé pour avoir été un protégé de Tchaikovsky, rien que ça!  Malgré sa passion pour le classique Frahm se tourne assez rapidement vers la techno, les sons analogiques et Berlin, très vite il décide d'expérimenter sur son instrument et casse les codes afin de pouvoir se dépasser. Il fallait pour lui dépasser le cadre formel. Popularisé en 2013 avec son album Spaces et surtout le titre Says, il entame une tournée européenne au cours de laquelle il compte à travers un set-up inédit faire découvrir ou redécouvrir son univers.

Vendredi 15 mai à Paris. C'est le jour qu'a choisi Nils Frahm pour poser ses valises à Paris le temps d'un concert.


Malgré son nouvel album Solo sorti cette année c'est avant tout un nouveau type de son que vient présenter l'allemand sur scène. Une expérience nouvelle à proposer. 2 pianos, 3 orgues entres autres, Nils avait donc pas mal de jouets à sa disposition. C'est au Trianon que son bus était garé; on aurait pas pu imaginer meilleure salle pour recevoir ce type de concert, un vieux théâtre offrant une acoustique sans pareille. On arrive vers 20h30, le temps d'attraper une bière et le concert commence; réglé comme une horloge l'allemand ne trahit pas ses origines.

La foule est silencieuse et attends sagement les premières notes. Après quelques mots transpirant la modestie, Nils s'installe derrière un des piano et commença à jouer…

On ne s'en rendait pas compte à ce moment-là mais Nils Frahm nous tendait la main pour nous emmener avec lui. Loin. Très loin.

Les premières notes sonnèrent comme une invitation au voyage, à l'inconnu. Il ne fallut pas plus de quelques minutes pour voir toute la salle entrer dans une sorte d'hypnose avec Nils Frahm en génial chef d'orchestre. Les notes s'enchaînent à une vitesse affolante le tout soutenu par une basse puissante et il est rapidement difficile de coller une étiquette sur la musique. Un instant on entend des sonorités africaines, on sentirait presque l'odeur de la brousse.
Tout à coup on se retrouve transporté en plein 2001 l'odyssée de l'espace, la plénitude aux lèvres. Une partie très sombre comme si on se réveillait tout à coup dans une forêt très peu accueillante, un petit solo de piano et 25 minutes plus tard le premier morceau s'achève sous les applaudissements du public. Etrangement les applaudissements n'étaient pas tonitruants un peu comme si toute la salle se réveillait d'un très long rêve. Toute notion du temps avait été perdue. Il était incroyable de voir comment certaines personnes qui au début du morceau restaient totalement stoïques se mettaient à doucement dodeliner la tête puis de plus en plus se lâcher au fur et à mesure que le morceau avançait.

Après ce long morceau la foule avait besoin de repos et l'ayant compris il fait deux trois blagues sur Paris et s'installe derrière son piano pour entamer un petit morceau (de dix minutes tout de même) sans adjonctions électronique. Un interlude reposant.

A ce moment-là on remarque que Nils Frahm est quasiment toujours dos à la scène lorsqu'il joue. Bien-sûr cela est dû à la disposition de ses instruments (probablement de son choix) mais on peut tout de même se poser la question. Alors que la dominante actuelle dans la musique est de l'offrir sous forme de divertissement (la musique donne lieu au spectacle); quel est le but recherché par Nils Frahm? L'artiste doit-il toujours s'effacer au profit de sa musique? Une salle très sombre, une mise en scène et des jeux de lumières minimalistes donnant visiblement même plus d'importance aux instruments qu'à l'artiste. Il y a peut-être aussi là dessous une part de timidité et modestie.
Ceci étant dit, c'était quand même un tour de force d'emmener toute la salle avec lui alors qu'il lui tournait le dos, sa musique comme seule arme.

Soudainement il annonce son dernier morceau. La salle est interloquée ne comprenant pas. Tout le monde regarde rapidement sa montre, plus d'une heure et demie s'était déjà écoulée depuis le début du concert. Du coup forcément des chansons de 30 minutes il ne peut pas en jouer mille.

On écoute sagement le dernier morceau; sympa mais moins planant que les autres. On a quelques passages plus saturés qui font plaisirs aux quelques énervés dans la salle qui se mettent à sautiller frénétiquement, mais c'était réellement son titre phare qu'on attendait: Says.


Après un rappel annoncé par l'artiste, des notes s'élèvent. On ne reconnait pas vraiment un morceau de l'artiste allemand, on comprends rapidement qu'il improvise sur son piano. Puis après quelques minutes une mélodie commence à apparaitre puis c'est au sourire aux lèvres que la salle reconnait Says. Quelques sifflets partent et l'ambiance devient électrique. Des frissons. Le titre de déçoit pas et les émotions sont définitivement plus vives en live. On est pas déçu.

Sur la chanson la plus connue de l'artiste quelques appareils photos et smartphones apparaissent assez sporadiquement mais c'est alors que je me rends compte qu'en fait presque personne ne prends de vidéo ou de photos. Toute la foule est là pour la musique et seulement la musique

Un dernier coup d'eau et le dernier morceau de la soirée débute avec Nils qui travesti des brosses de toilettes en instruments de musique pour comme il dit: "qu'on pense à de belles choses quand on va au petit coin". L'humour allemand sans aucun doute. Après être allé jusqu'à frotter les brosses à même le micro, c'est évidemment sur son piano que Nils Frahm clôt cette soirée. Une improvisation de cinq minutes qui nous scotcha un dernier coup.

On ressort un peu étourdi mais persuadé d'avoir assisté à un grand moment de musique. On croise Woodkid, tout sourire, qui était venu observer et apprécier un de ses pairs en action.

Les jambes sont molles comme après un long voyage. Jusqu'au prochain.

Le son du moment

Tu trouveras pas Justin Bieber, mais surement ton bonheur.

 
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